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MadebyEcoMenuiserie, Trophée FSE d'Or 2017
Chantier d’Insertion dédié à la création et la fabrication de mobilier design en bois et métal récupéré, « MadeByEcoMenuiserie » s’inscrit dans une logique d’économie circulaire et de circuits courts via le réemploi et la valorisation de déchets bois. Depuis juin 2015, le chantier qui emploie 8 salariés en CDDI (Contrats à Durée Déterminée Insertion), a fait migrer son activité initiale d’éco-construction vers l’éco-menuiserie.
Maîtriser la matière pour maîtriser sa vie
Il a quelque chose de particulier. Sa texture, son odeur, ce qu’il permet, ce meuble designé à partir d’une matière brute. Alexandre Bodet, responsable du chantier d’éco-menuiserie et du projet intitulé « MadeByEcoMenuiserie » explique qu'il se passe toujours quelque chose avec le bois : « Dans notre chantier d’insertion, nous accueillons souvent des personnes en déficit de confiance. Parvenir à créer de beaux objets est très gratifiant. Odeur, toucher, finitions… Travailler le bois permet de réintroduire le plaisir dans le travail, et dans la vie même. »
Conçu à partir de bois récupéré ou d’essences fournies par des scieries locales, dans une logique d’économie circulaire et de circuit court, le chantier d’éco-menuiserie de la Plateforme d'Insertion par l'Humanitaire et la Coopération de Romans-sur-Isère accueille depuis juin 2015 des salariés de 18 à 60 ans. Des hommes beaucoup, mais aussi des femmes, aux problématiques très variées : addiction, handicap, rupture du lien social, prison… Des difficultés de vie personnelle qui empêchent l’accès à une vie professionnelle mais sur lesquelles Alexandre Bodet explique qu’il est important de ne pas se focaliser : « Nos 8 salariés sont accompagnés par des Conseillers en Insertion Sociale et Professionnelle qui les aident à lever tous ces freins à l’emploi que sont le permis de conduire, le logement, l’administratif… Mais l’enjeu, c’est aussi de ne pas regarder uniquement les problèmes et d’identifier les moteurs. L’activité professionnelle est un support pour recréer de la dynamique et du lien. Elle permet de redevenir acteur à 100 %. » Dans cette logique, le chantier s’appuie sur les talents et compétences des salariés pour développer son activité. L’un sait travailler le métal, un autre connaît les techniques de tapisserie et garnissage ; autant de ressources à mettre au service du design. Alexandre Bodet commente : « Il y a des contraintes positives. Certains salariés ne connaissent rien à la menuiserie en arrivant sur le chantier mais ils ont d’autres compétences. La diversité des parcours nous permet de créer et de prendre des voies auxquelles nous n’aurions peut-être pas pensé. C’est utile pour l’activité et valorisant pour la personne. » C’est ainsi qu’est né par exemple le « fûteuil » designé par « MadeByEcoMenuiserie ». De vieux fûts industriels, du bois, du métal. Des savoir-faire cumulés pour ce meuble rustique repensé selon les codes actuels.
Exposés dans des showrooms, commandés par des restaurants ou des entreprises qui représentent 75 % de la clientèle, les meubles conçus et fabriqués par « MadeByEcoMenuiserie » , sous la houlette de Isabelle Cazenave menuisière ébéniste-formatrice dédiée, sont de toutes sortes – tables basses, étagères, banques d’accueil. Créé en petite série, le mobilier est unique et personnalisable selon les besoins du client. Deux critères clés : réemployer des ressources destinées à être jetées et ne jamais perdre de vue la qualité. C’est le défi permanent de ce chantier d’insertion qui doit tout à la fois former et produire. Pour cette structure associative dont l’ADN repose sur des valeurs écologiques de réutilisation de déchets auxquels elle donne une seconde vie, la symbolique est forte : « Nous créons des objets haut de gamme à partir de « déchets ». Des matériaux cassés que l’on ne juge pas beaux de prime abord. Et qui deviennent des œuvres, des pièces uniques qui ont toute leur place dans des environnements de standing. C’est un vrai message envoyé à nos salariés. » Un projet de valorisation, à tous les niveaux, qui compte sur la force du territoire local d’où viennent les matériaux – des palettes de bois suffisamment grandes, épaisses et robustes pour produire des meubles – mais aussi les idées.
« MadeByEcoMenuiserie » s’associe avec d’autres structures locales pour concevoir des projets : la société créatrice de meubles design « Le Point D », la société d’éclairage Tedess ou encore Acropose pour du mobilier urbain. Le chantier d’insertion apporte sa valeur ajoutée à des sociétés privées. Pour le responsable, au-delà du levier économique, l’enjeu est de consolider un ancrage local pourvoyeur de liens et donc d’opportunités professionnelles pour les salariés en insertion. Acquérir des compétences mais aussi retrouver sa place dans la société, explique Alexandre Bodet : « Les salariés acquièrent des savoir-faire techniques et de la méthodologie. Le travail du bois demande de la précision, de la rigueur, de l’organisation. Autant de compétences transposables dans d’autres métiers. Certains trouvent un emploi après le chantier, d’autres reprennent une formation en menuiserie, ou dans un autre domaine professionnel, l’important étant qu’ils trouvent leur voie. Au-delà, ils retrouvent le contact avec la société via un travail d’équipe, les fournisseurs, les clients entreprises ou particuliers. » En participant à transformer des idées en objets, les salariés retrouvent aussi une forme de pouvoir sur les choses et sur leurs propres choix. Quand de la matière transformée par ses propres mains renaît la confiance en soi.