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Interview Caroline Morda, coordinatrice du dispositif PREPAS SPORTS
PREPAS SPORTS « Parcours de Remobilisation Educatif Personnalisé Autour du Sport » est un projet porté par le Stade Bordelais Asptt. Ce dispositif est cofinancé par le POn Initiative pour l’Emploi des Jeunes (FSE). D’une durée de cinq mois, PREPAS SPORTS propose aux jeunes NEET, étant ni en emploi, ni en étude, ni en formation, des activités sportives mais aussi des formations qualifiantes. La coordinatrice du dispositif, Caroline Morda, revient sur cet accompagnement socio-professionnel qui fait du sport un outil de remobilisation innovant pour ces jeunes en situation d’exclusion.
Comment est né PREPAS SPORTS ?
En tant que club sportif, nous avions été sollicités par la Protection Judiciaire de la Jeunesse (PJJ) pour proposer des activités sportives aux jeunes en situation d’exclusion. Dès le départ, nous avons aussi souhaité introduire un aspect « réinsertion ». PREPAS SPORTS est ainsi né en 2015. Il s’agit d’un dispositif combinant pratiques sportives et accompagnement socio-professionnel pour les jeunes NEET. Organisée deux fois par an, la formation dure cinq mois et accueille à minima 12 jeunes par session.
Comment les jeunes sont-ils orientés vers votre dispositif ?
Ils sont orientés par les services de la Protection Judiciaire de la Jeunesse mais aussi par les Missions locales, les services de l’Aide Sociale à l’enfance, les associations de prévention… De nombreux jeunes passent encore entre « les mailles du filet » et le sport est un bon moyen de les attirer. Nous recevons ensuite tous les jeunes en entretien individuel.
Quel est le profil des jeunes participants ?
A l’origine, le dispositif était ouvert aux jeunes de 16 à 22 ans ; nous les accueillons aujourd’hui jusqu’à l’âge de 25 ans. Il y a généralement plus de garçons que de filles. Ces jeunes, bien souvent, n’ont pas de projet professionnel. Ils doivent être suffisamment motivés pour en construire un et avoir envie de vivre une expérience collective. Ils n’ont pas besoin d’être performants en sport, même si souvent c’est cet aspect-là qui les intéresse particulièrement. Notre objectif est avant tout qu’ils prennent du plaisir.
Le sport est au cœur du dispositif…
La formation est composée de plusieurs cycles combinant pratique de sports collectifs et sports de remise en forme, de type musculation, renforcement musculaire, fitness… Certains jeunes ont connu des problèmes de santé ou d’addiction et le sport est un moyen de les aider à se relever. Un cycle handisport est également organisé à chaque session.
PREPAS SPORTS est aussi un dispositif de réinsertion professionnelle…
Lorsqu’un jeune entre dans le dispositif, il élabore un projet professionnel. Des temps de chantiers et de stage lui permettent de découvrir différents métiers. Des entreprises comme SANOFI, VINCI, Décathlon… accueillent nos participants en stage tout comme des municipalités (ville de Pessac…) et de nombreux centres d’animation. Nous pouvons aujourd’hui compter sur un fort réseau de partenaires !
Pour les jeunes souhaitant s’orienter vers les métiers du sport et de l’animation, une formation au BAFA est proposée. Nous proposons aussi une formation au métier de surveillant baignade qui maximise leur employabilité. En parallèle, les jeunes suivent aussi une formation aux premiers secours.
Au-delà de cette dimension professionnelle, nous travaillons aussi sur l’accès à la mobilité des jeunes. On leur permet par exemple de passer l’Attestation de Sécurité Routière (ASR) et le permis AM, l’ancien Brevet de sécurité routière (BSR) permettant de conduire des scooters.
PREPAS SPORTS s’adresse à un public en situation d’exclusion. Quelle approche adoptez-vous ?
Notre approche est transversale : elle repose sur le sport mais aussi sur le théâtre, la construction d’un projet professionnel, un suivi médical… Pour entrer dans le dispositif, les jeunes doivent en faire la demande. Pour nous, 50 % du travail est fait quand il y a une adhésion des jeunes dès le début du projet. Chaque lundi matin, la semaine commence par un temps de remise en forme musculaire suivi d’un temps de forum/débat. Nous organisons également des séances de théâtre d’improvisation leur permettant d’être plus à l’aise à l’oral. Il faut ensuite les responsabiliser et leur montrer qu’ils ont toute notre confiance. Chaque année, nous organisons par exemple un « Trophée de PREPAS SPORTS », évènement ouvert à tous nos partenaires. Ce sont les jeunes qui organisent tout de « A à Z » et qui encadrent la journée.
Quels sont les premiers résultats ?
Sur les cinq premières sessions, 44,8 % de jeunes sont en emploi, 19,4 % en formation, 23,9 % en finalisation de recherche d’emploi et 3 % en recherche de formation. Après leur sortie du dispositif, nous mettons en place un suivi individuel de chaque jeune pendant un an. On s’est vite rendu compte que si l’on n’était pas présent après leur sortie, le « soufflet » risquait de retomber.
Près de 45 % des jeunes sont en emploi à leur sortie du dispositif : quels types d’emplois occupent-ils ?
Grâce à la formation BAFA (Brevet d’Aptitude aux Fonctions d’Animateur), ils sont très vite employables. Ils accèdent aussi à des emplois dans la sécurité, dans les métiers du bâtiment, de l’aide à la personne… Ce sont essentiellement des contrats courts, de type CDD ou service civique. Le monde de l’emploi est souvent anxiogène pour ces jeunes et les services civiques sont une bonne transition.
Quel bilan tirez-vous de cette expérience ?
Le sport est pour nous le meilleur outil d’insertion pour des jeunes de cette tranche d’âge. Le succès de PREPAS SPORTS tient aussi à son équipe : deux éducateurs sportifs, deux éducatrices spécialisées, une coordinatrice et un médecin du sport. Nous remettons sans cesse nos pratiques en question pour proposer un accompagnement qui soit le plus adapté possible aux jeunes. Chaque session est différente, en fonction du profil des jeunes accueillis (jeunes issus des quartiers politique de la ville, jeunes d’origine étrangère, handicapés…).
Comment est financé le dispositif ?
Le programme est financé par le Fonds Social Européen (FSE) dans le cadre de « l’Initiative pour l’Emploi des Jeunes ». Nous sommes également soutenus par tous les acteurs institutionnels de la Gironde : la Région, le Département, la Préfecture, la Direction Régionale et Départementale Jeunesse et Sport, la Métropole, la Municipalité de Bordeaux… Ces acteurs institutionnels participent aussi à l’ingénierie du projet.
Quels sont les prochains challenges à relever ?
Continuer de développer PREPAS SPORTS est un défi de tous les jours, notamment en aidant d’autres acteurs à monter des dispositifs similaires. Le Stade Montois, sur le territoire des Landes, s’est récemment lancé dans l’aventure. Nous avons également un autre projet : créer le premier Pôle d’insertion par le sport en France. Ce pôle, situé dans le Quartier prioritaire politique de la Ville des Aubiers à Bordeaux, réunirait plusieurs partenaires. Il nous permettrait de repérer les jeunes, de les remobiliser à travers des activités et journées de découvertes de métiers et, enfin, de leur proposer une formation qualifiante dans le sport.